Mercredi 23 juillet 1968
Philippe,
Mon amour, mon amour vous me manquez. Depuis que vous êtes parti je ne vis plus, je somnambule dans un monde où sans vous à mes coté, la vie n’a plus de sens. Je suis comme privée d’air, enfermée dans une prison de verre. Je ne cesse de penser à vous, vous, encore et toujours vous. Vous êtes à quatre heures de moi, je suis à des années de vous.
Mon amour, mon amour je vous aime avec ce cœur qui me maintient en vie, loin de vous, grâce à cette envie incessante de vous revoir. Vous êtes le plus beau cadeau que le ciel ne m’est jamais fait. A quoi me servirait-il de vivre si ce n’était pas pour donner tout l’amour que je garde au chaud dans ce modeste cœur ?
Mon amour, mon amour je suis née à partir de l’instant où vos beaux yeux se sont posés sur moi. Vous avez fait naître en moi, un désir d’aimer et d’être aimée en retour. L’amour que je vous porte est si important qu’il ne peut être contenu tout entier dans mon cœur ; il est si fort qu’il me brûle de l’intérieur comme le soleil, cette grosse boule de feu dans l’univers.
Mon amour, mon amour, mon amour.
Je vous aime. M’aimez vous ?
Je suis vôtre pour l’éternité.
Mademoiselle Constance Dénatise
Vendredi 25 juillet 1968
Mademoiselle,
Nos regards se sont croisés dans une fraction de seconde, et mon cœur a cessé de battre. Lorsque nos lèvres se sont effleurées, le souffle que vous m’avez porté m’a ranimé et réchauffé le cœur. Combien pour moi cette minute de bonheur est précieuse. Seulement, cet instant de bonheur intense est un péché.
Ma vie est destinée à une autre : Mademoiselle Héloïse de la Barquarolle. Le prêtre nous a uni par les liens sacrés du mariage, et Dieu en est le témoin. Je ne peux me laisser aller au gré du vent, et écouter mon cœur comme bon me semble. Sachez que j’aime ma femme et qu’elle porte mon enfant. Ce petit être va naître dans un foyer normal, et sera aimé comme il se doit.
Je ne veux rien à voir à me reprocher, et je ne désire, en aucun cas que ce soit, mentir à ma femme et mon futur enfant. C’est pourquoi, en conséquence de tout cela, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir m’oublier, et de donner tout votre amour à un autre que moi.
Nous nous sommes rencontrés le temps d’une chanson, à présent le temps d’une lettre, et à l’avenir, nous serons indifférents l’un à l’autre.
Oubliez-moi.
Salutations les plus sincères.
Monsieur Philippe Louperrac
Dimanche 27 juillet 1968
Philippe,
Je ne peux me résigner à cela. Ma tête comprend votre position, mais mon cœur la refuse et ne peut s’empêcher de haïr Héloïse de la Barquarolle ; celle qui m’arrache à vous, et par Dieu qui plus est.
Depuis cette seconde où nous nous sommes aperçus, je ne vis plus. Si vous ne pouvez m’aimer, je préfère mille fois mourir, plutôt que de vivre encore quarante ans dans ce monde cruel, qui ne m’a jamais apporté autre chose que de la peine, de la haine et de la souffrance .Jusqu’au jour où vous avez posé vos yeux sur moi.
A présent, il n’y a pas une heure ou une seconde où je ne brûle pas de sentir vos mains se posées sur mon corps de jeune femme vierge.
Je sais que vous êtes le bon ; l’homme de ma vie. Je veux être à vous et à personne d’autre. Comment pouvez vous me demander de vous oublier, alors que depuis notre brève rencontre, je ne vis que dans l’espoir de vous avoir près de moi à nouveau. Ne serait-ce que pour une seconde.
Cette rencontre ne représente rien à vos yeux ? Vous dîtes que vous avez le devoir et l’obligation de m’oublier, mais votre cœur le désire t-il ? Je vous en conjure, si vous êtes fidèle à votre cœur, répondez moi et demandez moi de vous attendre. Je n’espère plus que vous dans ma misérable et insignifiante vie.
Je vous aime Philippe.
Répondez moi, je vous en conjure.
Constance Dénatise
30 juillet 1968
Madame,
Je ne suis qu’un homme parmi tant d’autres et à votre âge, je doute que vous ayez déjà rencontré l’amour. Je suis fidèle à mon cœur, j’aime ma femme ainsi que l’enfant qu’elle porte, mon enfant. En plus d’être fidèle à mon cœur, je le suis également envers mes devoirs.
Je suis heureux d’avoir fait votre connaissance et nullement je la regrette. Il est vrai que vous ne m’avez pas laissé indifférent mais n’attendez rien de moi. Vous êtes jeunes et à votre âge on aime sans aimer, on désire sans désirer, on espère sans espérer.
Regardez autour de vous et vous découvrirez des garçons dont vous ne soupçonniez pas l’ombre de l’existence et pourtant, sachez qu’ils sont nombreux à attendre un de vos regards, de vos sourires, de vos gestes.
Ouvrez les yeux et oubliez moi, je suis destiné à une autre vie…
Vous saluant bien.
Monsieur Philippe Louperrac